Définition de l'intégrationnisme et application sur les tests de personnalité

Nous pourrions définir l’intégrationnisme comme un mouvement entre la psychologie séculière et la théologie chrétienne. Dans l’accompagnement biblique, nous croyons que la Parole de Dieu fait autorité sur le but de la vie chrétienne, sur la raison d’être de l’humain, et qu’elle devrait être le filtre de tout ce qui pourrait provenir du monde séculier, et donc de la psychologie.

Nous devrions néanmoins préciser que, lorsque nous parlons de psychologie dans l’intégrationnisme, il s’agit surtout des courants de psychothérapie dont les présupposés sont très forts. Cela peut également être des théories plus classiques comme celle de l’estime de soi.

Je l’ai déjà dit dans un autre article, il est important de discerner la vision de l’être humain et du monde, derrière les théories de psychologie séculière. Il est également important de comprendre la construction des outils et des éléments qui peuvent nous être proposés.

Prenons l’exemple des tests de personnalité: ils proviennent généralement de deux grands courants: celui du MBTI de Jung/Myers-Briggs et celui du Big Five de Goldberg. Le MBTI date des années 40 et le Big Five des années 80, mais, considérer des théories datant de plusieurs décennies (voire parfois siècles) est rarement bon signe. Ces modèles sont pourtant utilisés tous les jours aujourd'hui, notamment en recrutement.

Le MBTI est souvent décrié (notamment par ceux qui utilisent le Big Five), car il n’a aucune valeur scientifique. En d’autres termes, aucune étude sérieuse ne soutient le MBTI dans une reproductibilité efficace.

Mais est-ce que nous devrions tout adouber par la science?

En tant que chrétien, je ne le crois pas. Cependant, des éléments d’anthropologie doivent nous faire réfléchir. Jung croyait (tout comme Freud) que plusieurs instances interagissaient au sein de l’individu: l’ego, l’inconscient personnel et l’inconscient collectif. Or, si nous regardons la Parole de Dieu, cette dernière phrase n’est pas un élément d’anthropologie biblique. À cela, je rajouterais que la psychologie moderne remet également ces instances en doutes, dans le fait que la science n’a jamais trouvé d’inconscient pulsionnel dans le fonctionnement de l’être humain. Il y a certes des éléments non-conscients (les biais cognitifs, par exemple), mais rien qui soit inaccessible.

Son pragmatisme peut éventuellement aider, mais personnellement, j’ai du mal à voir l’utilité de cet outil dans un accompagnement biblique. De plus, le risque serait de mettre inutilement la personne dans une catégorie.

Le Big Five se veut différent, car il est moins interprétatif et plus factuel dans l’observation des comportements (ce que veut être la psychologie moderne). Cependant, comme n’importe quel Test de personnalité, il a plusieurs limites qui peuvent se révéler problématiques dans un accompagnement:

• L’être humain est trop complexe dans son fonctionnement.
• Le risque serait de réduire la personnalité à un paragraphe descriptif est limitant, réducteur et partial.
• La personnalité n’est pas quelque chose de stable dans le temps. Nous évoluons sans cesse; nous changeons suivant le contexte, les gens en face de nous, ou le nombre d’heures de sommeil.
• L’être humain est trop instable dans son fonctionnement.

Les tests de personnalité sont des questionnaires, et là, entre en jeu tout un tas de biais cognitifs qui poussent les participants à orienter leurs réponses vers ce qui est acceptable, ou à minimiser certains éléments. Nous sommes chrétiens? Il est présupposé que chrétien = honnête. Ce serait super, mais ce n’est pas le cas.

La valeur prédictive dépend énormément du contexte et de la culture. Comme plusieurs modèles, le Big Five a été développé dans des pays occidentaux, industrialisé et avec des étudiants en études supérieurs. Certes, nous ne sommes pas avec l’échantillonnage de Freud et sa dizaine de bourgeois autrichiens, mais ce manque de diversité rend ces tests de personnalité moins efficaces.

Les tests de personnalités ne sont arrivés que très récemment dans nos sociétés. Je ne peux pas dire que je n’en ai jamais fait (si vous me connaissez un peu, sauriez-vous estimer les 4 lettres de ma personnalité selon le MBTI?) et ce n’est pas amusant de se confronter honnêtement à ce genre d’outil. Cependant, je suis assez mal à l’aise lorsque cela est utilisé dans l’accompagnement de personnes en souffrance. Le filtre que j’apporte à la psychologie moderne est peut-être plus restrictif (surtout venant d’un psychologue), mais cela permet d’être plus à l’aise avec ce que le monde séculier apporte. Si vous me lisez déjà depuis plusieurs années, vous savez que j’utilise plein d’éléments de la psychologie moderne.

Les chrétiens et les Églises des siècles passés n’avaient pas besoin d’interface pour accompagner les frères et sœurs en difficulté. Ils avaient une écoute éclairée, une bonne compréhension de la Parole et un amour pour leurs prochains. C’est notamment pour cela que nos formations, comme celle qui va se dérouler en octobre prochain à Teen Ranch, sont destinées à tous les membres des Églises locales.

Pour aller plus loin:

• L'identité en Christ, mais qu'est-ce que c'est?
• 4 réflexions qui devraient nous éloigner des psychothérapies séculières